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La sous-location pour remédier aux « lits froids » ?

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Les communes touristiques des régions de montagne connaissent une grave pénurie de logements, due au phénomène des « lits froids », ces résidences secondaires inoccupées une grande partie de l’année. Les maisons de vacances sont en outre bien souvent des passoires thermiques. Un élu vert propose de résoudre conjointement ces deux problèmes.

Le conseiller national valaisan vert Christophe Clivaz milite pour une transition énergétique équitable. Il se bat actuellement pour la mise en place d’un programme d’encouragement à la rénovation thermique des résidences secondaires, dans l’optique de la Stratégie énergétique 2050 de la Confédération. Beaucoup de maisons de vacances datent d’une époque où la question climatique ne se posait pas. Mais tous les propriétaires n’ont pas les moyens d’effectuer des travaux d’isolation ou de changer de système de chauffage. Un soutien des pouvoirs publics s’avère indispensable.
Les subventions seraient soumises à une condition : sous-louer les logements inoccupés durant une certaine partie de l’année. Cette offre bénéficierait autant aux touristes qu’au personnel des restaurants et des hôtels, qui peinent à se loger à un prix abordable dans les stations. Un marché de la location extrêmement tendu (moins de 1 % de logements vacants) est l’une des causes de la pénurie de main-d’œuvre dans les régions de montagne. L’ampleur de la crise apparaît directement corrélée à la densité de résidences secondaires dans les communes. Un phénomène attisé par le marketing touristique, mais aussi une interprétation permissive de la loi sur les résidences secondaires (LRS) et de la loi sur l’aménagement du territoire (LAT).

Une brèche dans la loi sur les résidences secondaires

Sur les 4,8 millions de logements de Suisse, 726 000 sont des résidences secondaires, occupées en moyenne 40 à 60 jours par an (chiffres de l’Office fédéral du développement territorial ARE). Cela signifie qu’un logement sur sept est vide durant 80 % du temps. En vigueur en 2016 pour remédier aux « lits froids », la LRS fixe un plafond de 20 % de résidences secondaires dans les communes. Mais son efficacité est minée par des assouplissements pour la reconversion des résidences principales et les logements affectés à l’hébergement touristique. Plus lucratives que les baux à durée indéterminée, ces options avantagent les propriétaires. Et pour corser la situation, un amendement autorise depuis peu la création de résidences secondaires supplémentaires dans le cadre d’une démolition et d’une reconstruction.

Zones à bâtir surdimensionnées

Après le boom de la construction dans l’après-guerre, qui a vu sortir de terre des dizaines de milliers de résidences secondaires, la loi sur l’aménagement du territoire (LAT) a consacré en 1980 la séparation des zones à bâtir et des zones non constructibles. Les premières ont été généreusement délimitées, selon le principe « plutôt trop que pas assez ». Il a fallu attendre la révision de 2014 pour qu’un semblant d’équilibre soit rétabli entre zones exploitables et zones à protéger, d’un point de vue environnemental s’entend. Car à l’intérieur des localités, les locataires demeurent toujours aussi démunis face aux mécanismes du marché. La pandémie a dopé les envies de résidences secondaires et la raréfaction des biens fait flamber les prix, accélérant le processus d’éviction de la population locale, même dans les régions rurales. L’ARE tire la sonnette d’alarme : en l’absence de mesures incisives, la situation ne fera que se péjorer.
Pendant ce temps, la Conférence suisse des aménagistes cantonaux temporise, arguant de la complexité de la planification dans chaque commune, La Confédération se borne de son côté à étudier de possibles incitations négatives.

Les mesures volontaires sont peu efficaces

Le bilan énergétique des résidences secondaires construites au siècle dernier laisse beaucoup à désirer. En 2017, ces bâtiments souvent mal isolés étaient chauffés pour moitié au mazout, à 15,1 % au gaz et à 9,4 % à l’électricité. Entre-temps, des systèmes intelligents, obligatoires dans certains cantons, permettent de gérer plus efficacement les besoins en chaleur depuis sa résidence principale. Mais ce n’est guère suffisant.
En l’absence de chiffres précis, le taux d’assainissement thermique des résidences secondaires est sans doute un peu inférieur à celui des logements principaux, qui se situe selon l’Office fédéral de l’énergie entre 3 % (chauffage au gaz) et 5-6 % (chauffage au mazout) pour 2011-2020. On pourrait faire (beaucoup) mieux.
Facultatifs, ces travaux se heurtent à des obstacles connus : désaccords au sein de communautés de PPE, propriétaires vivant à l’étranger, voire simple manque de volonté, lorsque la rénovation d’un toit serait pour quelques francs de plus l’occasion d’installer des panneaux solaires. Une obligation légale mettrait fin aux atermoiements.
D’autres mesures ne sont pas à négliger, comme une taxe incitative sur les résidences secondaires pour contribuer au financement de logements abordables.
Le contexte politique actuel laisse augurer de rudes combats pour concilier les enjeux sociaux et environnementaux du dossier. L’an dernier, le Conseil fédéral a déclaré « non pertinent » un programme d’encouragement à l’assainissement des logements touristiques dans les Alpes. Et la pression sur le budget fédéral devrait avoir raison du Programme Bâtiment, celui-là même qui a permis d’augmenter de 40 à 50 % le taux de rénovations énergétiques entre 2011 et 2020.

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